La convention préventive de la double imposition Belgique – Pays-Bas

Rémunération des administrateurs au titre de la nouvelle convention préventive de la double imposition

By:
Linda Van de Reep,
Kathleen Van Elsacker
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Lors de précédentes contributions, nous nous étions déjà penchés sur l’article 5 (établissement stable) et l’article 10 (dividendes) de la nouvelle convention préventive de la double imposition conclue entre la Belgique et les Pays-Bas et signée le 21 juin 2023. 

Dans cet article, nous passons en revue quelques modifications majeures apportées à l’article de la convention portant sur la gestion des sociétés. L’actuel article 16 relatif aux administrateurs devient l’article 15 de la nouvelle convention. 

Situation actuelle

En vertu de la convention actuelle, le revenu d’un administrateur ou de toute fonction similaire est imposé dans le pays où la société est établie. Cela signifie qu’un administrateur belge d’une SRL néerlandaise paye un impôt sur le revenu aux Pays-Bas, quel que soit l’endroit où il exerce physiquement ses activités. Sont concernées ici non seulement la rémunération des administrateurs pour leur mandat officiel, mais aussi les rémunérations des fonctions dirigeantes chargées, par exemple, de la gestion journalière.

Nouvelle convention

Il en va différemment dans la nouvelle convention. La règle précitée ne s’applique plus qu’aux rémunérations obtenues en qualité d’administrateur d’une société. En d’autres termes, seule la rémunération perçue pour un mandat officiel d’administrateur est imposée dans le pays d’établissement de la société. Les autres activités, notamment celles liées à la gestion journalière, sont imposées conformément à l’article 14 de la nouvelle convention. Elles sont régies par l’article relatif aux travailleurs ordinaires. L’imposition de l’administrateur-travailleur pourrait donc devenir bien plus complexe, car l’article sur les travailleurs ordinaires tient notamment compte de la présence physique du travailleur dans l’État de résidence et de travail. 

Exemple – nouvelle convention

Bart vit en Belgique et est nommé administrateur statutaire d’une SRL néerlandaise. Il perçoit une rémunération de €50 000 en tant qu’administrateur. Il perçoit en outre une rémunération de €100 000 pour ses activités de gestion journalière/direction : il effectue 22% de ses prestations liées à la gestion journalière en Belgique. 

La convention préventive de la double imposition

La nouveauté réside dans le fait qu’en vertu de la nouvelle convention, la Belgique peut imposer les revenus (€22 000) perçus pour les activités de gestion journalière exécutées en Belgique. Les Pays-Bas prélèvent des impôts sur la rémunération d’administrateur, quel que soit l’endroit où l’administrateur exerce ses prestations. Les Pays-Bas peuvent aussi imposer les activités de gestion journalière exercées aux Pays-Bas.

Tenant compte de cela, il est important d’établir une distinction claire dans le contrat d’administrateur entre la rémunération perçue pour la mission d’administrateur statutaire/le mandat officiel et la rémunération perçue pour les autres activités, comme la gestion journalière.

Il est clair que l’imposition de la rémunération d’un administrateur devient ainsi plus complexe. Il est en effet possible que des rémunérations qui sont aujourd’hui uniquement imposées aux Pays-Bas ou en Belgique soient à l’avenir aussi (partiellement) imposées dans l’autre pays. C’est ce que l’on appelle un salary split ou payroll split. L’administrateur doit payer des impôts dans différents pays pour ces ‘autres activités’. En pratique, ce système peut être avantageux, car il permet de profiter de la tranche d’imposition la plus basse dans deux pays (ou plus).  

Dans le pays où il est résident, l’administrateur doit mentionner ses revenus internationaux dans sa déclaration fiscale. Il doit donc aussi y préciser les rémunérations imposées dans le pays d’établissement de la SRL. Ces revenus ne seront toutefois pas imposés une deuxième fois, conformément à la convention. 

Exemple – développement

Bart doit indiquer dans sa déclaration belge à l’impôt des personnes physiques : 

  1. la rémunération perçue pour les activités de gestion journalière exercées en Belgique (€22 000)
  2. les rémunérations perçues pour l’exercice de son mandat d’administrateur (€50 000) et
  3. la rémunération restante perçue pour les activités de gestion journalière exercées aux Pays-Bas (€78 000), qui est imposée aux Pays-Bas (après déduction des cotisations de sécurité sociale et impôts néerlandais). 

Pour éviter une double imposition, les revenus au titre des points 2. et 3. sont exonérés d’impôts en Belgique (application de la méthode de l’exonération). La réserve de progressivité est ici d’application. Cela signifie donc qu’aucun impôt belge sur le revenu n’est payé sur les revenus néerlandais, mais que ces derniers sont néanmoins pris en compte pour déterminer le taux d’imposition applicable aux revenus imposables (en Belgique). Des taxes communales sont toutefois dues.

Si nous prenons la situation inverse (Bart, résident néerlandais, est nommé administrateur d’une SRL belge et effectue 22% de ses activités de gestion journalière aux Pays-Bas), les Pays-Bas veilleront aussi à éviter une double imposition. La méthode de l’exonération s’applique à la rémunération belge perçue pour les activités de gestion journalière, à hauteur de €78 000. 

Jusqu’au 1er janvier 2023, la méthode de l’exonération s’appliquait aussi aux rémunérations d’administrateur étrangères. Cette règle n’est dorénavant plus d’application, de sorte que pour sa rémunération belge d’administrateur à hauteur de€50 000, Bart pourra uniquement imputer l’impôt belge déjà payé dans sa déclaration néerlandaise à l’impôt des personnes physiques (application de la méthode de l’imputation). Selon les circonstances, une méthode peut être financièrement plus avantageuse que l’autre.

Sécurité sociale

Par souci d’exhaustivité, notons que rien ne change sur le plan de la sécurité sociale. Dans ce domaine, les règles de conflit de lois du Règlement 883/04 sont encore appliquées. Par conséquent, une différence entre le traitement fiscal et social de la rémunération perçue pour les activités de gestion journalière est plus susceptible de se produire en vertu de la nouvelle convention.

Conseil

Les éléments ci-dessus montrent donc à nouveau qu’en vertu de la nouvelle convention, il est encore plus important d’établir une distinction (écrite) claire entre la rémunération perçue en qualité d’administrateur et la rémunération perçue pour les autres activités (gestion journalière).

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